François Grandin de l'Eprevier
FONDATEUR ET PÈRE SPIRITUEL DE RÉSURGENCE

Sa vie, sa personnalité, ses idées. L’esprit et les valeurs qu’il a insufflés dans Résurgence dès sa création et pendant les trente-trois années de sa présidence sont toujours présents dans les gènes de l’association. Ses grandes qualités humaines ont eu aussi une large influence sur Vendôme et le Vendômois.

 

Parmi les multiples engagements de François Grandin de l’Eprevier, Résurgence est un de ceux auxquels il se consacra grandement. Effet symbolique de coïncidence, quelques jours avant son décès, le 5 avril 2018, Résurgence en Vendômois venait d’atteindre ses 48 ans d’existence, fidèle à la conviction de la valeur humaine du patrimoine que l’association avait annoncée dès sa création. Cette conviction était certes partagée par un petit nombre de personnes, mais accueillie avec scepticisme, voire incompréhension ou raillerie par beaucoup. Le vocable « vieilles pierres » ne se prononçait pas à l’époque sans ironie.

Aujourd’hui, le langage est tout autre. Les mentalités dans ce sens ont heureusement évolué. Durant ce presque demi-siècle d’existence [NDLR : et même plus désormais], Résurgence a prouvé par des réalisations concrètes que le message qu’elle annonçait avait sa place dans le présent et qu’il était un gage pour l’avenir. Ce message, son message, Résurgence l’a traduit dans les faits sous la présidence de François, durant plus de trois décennies, grâce à sa propre détermination et à l’implication de tous ceux et celles qui, entraînés dans son sillage, ont pris une part active sur les chantiers de restauration de patrimoine bâti, à l’atelier vitrail ou qui, comme Yves Roignan, ont assuré la présidence à sa suite. A tous les bénévoles comme aux centaines d’adhérents et de sympathisants, François ne manquait jamais de témoigner sa profonde gratitude.

Un érudit engagé

Héritier de l’esprit de la famille Grandin de l’Eprevier qui s’est établie à Vendôme au début du XIXe siècle, vers 1820, François, né à Paris en décembre 1929, a grandi en région parisienne puis s’est installé avec sa famille, en mars 1966, dans la maison familiale au centre de Vendôme. Il a accompli sa carrière professionnelle comme cadre dans l’industrie et à la Chambre de Commerce. Dès son arrivée à Vendôme, il s'est investi dans la vie associative de la région, comme bénévole. Pendant de nombreuses années, il prit notamment, avec son épouse Béatrice, la responsabilité de l'accueil des pèlerins de Saint-Jacques-de-Compostelle. Chacun appréciait ses connaissances en histoire, en généalogie, en héraldique comme celles du patrinoine du Vendômois.

Pendant les mois qui ont précédé la naissance de Résurgence, François menait une réflexion sur la sauvegarde du patrimoine local avec Jean Bernadac, personnage multi-talentueux, qui, entre autres passions et outre le patrimoine, partageait la même affection pour Ronsard et la vallée du Loir. Un des événements déclencheurs de cette réflexion fut la destruction de l'église de l'ancien couvent des cordeliers puis des calvairiennes, suite au rachat de l'ensemble par la ville de Vendôme. Dans l'ancien couvent, sera installée la maison de retraite actuelle et, à la place de l'église, fut construit le pavillon du directeur de l'hôpital.

Le fondateur de Résurgence

C'est alors qu'au début de 1969, le diocèse de Blois chercha à se dessaisir de la petite chapelle romane Saint-Pierre-La-Motte, du XIe siècle, en la proposant à la ville de Vendôme qui, devant son état de délabrement et le coût estimé des travaux de restauration, refusa. La Société archéologique ne l'accepta pas, pour les mêmes raisons. Au nom d'un petit groupe de Vendômois volontaires pour tenter l'aventure, François, conscient de l'intérêt architectural et historique de la chapelle, fit faire une estimation de travaux minimum de conservation. Et l'audace au coeur, en mars 1970, François déclara à la sous-préfecture l'association à qui la chapelle avait été concédée.   

Les fondateurs étant, à cette époque, sans expérience des chantiers de bénévoles, il restait à trouver le financement des travaux de sauvegarde à confier aux entreprises. Devant la modestie des concours privés obtenus par diverses actions, vint l'idée d'organiser une manifestation musicale de qualité dans un lieu patrimonial privé, habituellement fermé au public. C'est ainsi que M. et Mme Michel de Rochambeau acceptèrent d'accueillir ce concert dans le cadre de leur château, à Thoré, le 17 juin 1972; et grâce au bénéfice réalisé, à l'automne les travaux étaient engagés sans aide de la Ville. Et en mai de l'année suivante, la chapelle restaurée était inaugurée en présence de la collectivité !   

François et ses amis de Résurgence en tirèrent plusieurs leçons : il n'y a pas d'aventure qui ne mérite d'être tentée, l'avenir le démontrera même avec des chantiers importants, à condition toutefois de respecter certaines valeurs fondamentales que François aimait à répéter : la vérité, le sérieux, la qualité, l'indépendance. Sur ce dernier point, pour se doter de moyens financiers de fonctionnement nécessaires, la soirée musicale initiale de Rochambeau devait être le prélude à beaucoup d'autres […] [Voir la liste des soirées musicales :  Patrimoine et musique : Tous les concerts de Résurgence], grâce au climat de confiance et au savoir-faire acquis par l'association.   

De nombreux succès

François de l'Éprevier pouvait, à juste titre, être fier du bilan, des 170 vitraux restaurés ou crées [Voir aussi L'atelier vitrail de Résurgence : Tous les vitraux de 2003 à 2023] par les passionnés de l'atelier vitrail, posés aussi bien sur l'édifice classé de la Trinité, à Vendôme, que sur de modestes églises de campagne, et des chantiers de sauvegarde et de restauration du patrimoine bâti. Chaque chantier eut sa propre histoire comme il aimait à le rappeler. Ainsi, à Saint-Arnoult, un des premiers chantiers, sur le toit de l'abri de la roue de carrier servant à hisser les blocs de pierre de la carrière de tuffeau en contrebas ou les dimanches au pied de la Tour de l'Islette, vestige délabré de l'enceinte médiévale de Vendôme, où, président, il participait à la restauration en montant à la seule force des bras des seaux de moellons que plusieurs de ses propres enfants répartissaient sur la muraille à reconstruire. Une de ses plus grandes satisfactions fut en effet de faire participer des jeunes aux travaux de restauration, en groupes comme des scouts de Vendôme ou de Belgique au four à chaux de Berger à Villiersfaux et à la grange de la Couture à Montoire, ou des étudiants du lycée agricole d'Areines, comme ce fut le cas sur les chantiers de restauration de maisons de vigne à Thoré.   

La liste est longue [Voir 1970-2020, 50 ans de rénovations - Tous les chantiers de Résurgence] : au nom de la mémoire religieuse comme, outre la chapelle Saint-Pierre-La-Motte, la chapelle de Guériteau à Choue et l'église de Longpré, les calvaires à Mazangé et à Prunay, les Grands Greniers des moines de l'abbaye de la Trinité à Vendôme, inaugurés en 1990 durant quatre jours dont un fut réservé pour une présentation aux enfants des écoles. Au nom de la mémoire historique comme la Maison des comptes des ducs de Vendôme, la porte de Fort-Girard à La Ville-aux-Clercs ou le lavoir des Cordeliers, ou enfin, au nom de la mémoire utilitaire, les lavoirs Saint-Georges à Vendôme, de Brenière à Naveil et de la Saulnerie à Thoré, le puits de Villaria à Naveil…   

À plusieurs reprises et notamment lors des 10e et 25e anniversaires, les plus hauts responsables du Patrimoine tels M. Pattyn et Mme de Saint-Pulgent, directeurs du patrimoine au ministère de la Culture répondront à l'invitation de François, procurant de grands moments d'honneur pour Résurgence, pour Vendôme et le Vendômois.   

Mais aussi quelques regrets

« Tout ne fut pas une entière réussite », comme le répétait souvent le président fondateur. Il fut des circonstances, heureusement peu nombreuses, où sa seule bonne volonté et ses qualités d'habile négociateur n'ont pas suffi devant l'incompréhension ou le refus de dialogue. Ce fut, hélas, le cas notamment pour l'aménagement du faubourg Saint-Bienheuré ou pour le dossier finalisé dans tous ses aspects pour la sauvegarde de la Tour de Poitiers du château de Vendôme. Son amertume à l'égard de la décision négative de la DRAC, signifiée quelques jours avant de lancer le chantier, ne s'est jamais adoucie. Autre gros dossier que François, entouré de ses compagnons d'armes, Paul Dujardin et Gilbert Guimont, a initié par une lettre en octobre 1987 au maire de Vendôme, soulignant l'intérêt du Grand Manège du Quartier Rochambeau et demandant sa conservation. S'ensuivirent douze années d'engagement conjoint avec Perche-Nature et la Société archéologique, avec l'heureuse issue positive saluée par tous.   

Résurgence conservera de François le souvenir d'un président à la vision claire, aux qualités de droiture et de générosité, sachant garder le cap en ancien marin qu'il fut, avec cette dose d'humour qui illuminait son regard et faisait surmonter les obstacles. Actif dans l'ombre le plus souvent, avec peu de moyens, sans dossiers inutiles, sans honneurs officiels, François de l'Éprevier pouvait s'enorgueillir de résultats qui contribuent au charme de Vendôme et du Vendômois. Résultats, comme il aimait à le répéter, qui sont le fruit de l'enthousiasme et de la persévérance des bénévoles.      

Extrait d’un article d’André Fleury, publié dans le Bulletin de la Société archéologique, scientifique et littéraire du Vendômois, année 2019 pages 163 à 166.

A lire aussi : Place François Grandin de l'Eprevier à Vendôme : Inauguration officielle le 29 juin 2023

Ça s'est passé sur le chantier

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